La critique du naturalisme – à savoir que l’Occident aurait « inventé » la nature, séparée de la société pour mieux l’exploiter – est un des fondements des « pensées du vivant ». Celles-ci ont été attaquées par certains intellectuels pour être dépolitisées ou dépolitisantes, risquant de devenir du « développement personnel pour riches », selon ta propre expression. Faut-il selon toi politiser la critique du naturalisme ?
Critiquer le naturalisme, c’est-à-dire critiquer notre rapport collectif aux vivants non humains et affirmer qu’il faut en changer, est déjà en soi une proposition politique. Au cours des deux derniers millénaires, et plus particulièrement des deux derniers siècles, les plantes, les animaux et les milieux de vie ont progressivement été relégués dans la catégorie de la « nature », de l’« environnement », au statut d’objets à l’entière disposition des humains.
Entretien à retrouver dans notre numéro 57 « Manger les riches ? », disponible en kiosque et sur notre boutique.
Le premier volet de la critique de cette façon « naturaliste » de se rapporter aux non-humains souligne son lien avec la dévastation de la planète. Sans en être la cause, elle la rend possible, ne serait-ce que parce qu’elle nourrit les discours qui la légitiment : puisque les non-humains sont des objets, il est possible de les exploiter sans aucun égard, sans limite et sans devoir de...