Écologie et colonialisme

Alice Zeniter : « Il faut prendre en compte la répartition inégale de l’empathie dans le monde »

Photos : Emil Pacha Valencia

Depuis le succès de L’Art de perdre (2017) la romancière et dramaturge Alice Zeniter déploie un propos engagé sur la colonisation, les silences et les replis identitaires qui en découlent. Autrice prolifique, elle questionne de longue date la place des femmes dans la fiction. Plus récemment, le dérèglement climatique et le rapport au vivant se sont à leur tour invités dans son œuvre. Socialter l’a rencontrée à l’occasion de la parution de son dernier roman, Frapper l’épopée, qui se déroule en Nouvelle-Calédonie. Quelques mois après les violences qui ont bouleversé l’archipel – fracturé par les clivages entre indépendantistes et loyalistes et une réforme constitutionnelle inattendue – son regard offre une nouvelle occasion d’interroger les conséquences écologiques et politiques du fait colonial.

Le 24 septembre a marqué les 171 ans du début de la colonisation de la Nouvelle-Calédonie par la France. Les événements par ailleurs violents qui ont divisé le territoire depuis mai 2024 ont ravivé le sentiment qu’il reste sous l’emprise coloniale. Quelle est votre analyse de ces derniers mois, au moment où paraît Frapper l’épopée ?

Votre emploi du terme« colonisation » est intéressant, car beaucoup de médias ou d’institutions parlent de « prise de possession », un euphémisme qui masque le fait colonial.

Ce choix de ne pas nommer correctement les faits participe d’une forme de malaise vis-à-vis de cette histoire. Car nous savons que la colonisation est moralement condamnable, et que nous vivons dans les résidus d’un empire colonial. Ces événements s’inscrivent aussi dans des narrations. Ainsi les épopées qui racontent des colonisations sans viols, sans vols, sans pillages ou tueries d’indigènes sont fausses. De même que les récits comme celui du chevalier d’Entrecasteaux qui débarque en territoire kanak au cours du XVIe siècle et prétend trouver un rocher vide…

Entretien issu de notre n°66, en kiosque, librairie, à la commande ou sur abonnement.

Pour revenir à l’actualité récente, je pense qu’il y avait des choses prévisibles et d’autres moins. Le fait de toucher au corps électoral (le 15 mai 2024, le gouvernement a adopté une proposition de loi modifiant le corps électoral de Nouvelle-Calédonie en...

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NUMÉRO 66 : OCTOBRE-NOVEMBRE 2024:
La crise écologique, un héritage colonial ?
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