C’était il y a deux ans. Ce samedi 17 novembre 2018, la France s’est réveillée en jaune fluo. Barrages routiers, occupation de ronds-points, rassemblements spontanés… L’acte 1 des Gilets jaunes et ses 2 000 points de blocage ont inauguré une contestation d’un genre nouveau. Pas de grève massive, pas de manifestation unitaire encadrée par les syndicats, mais des axes de communication ralentis, des raffineries occupées, des entrepôts logistiques assiégés. Rémi, 26 ans, était là. Les premières semaines de mobilisation, avec son groupe de Gilets jaunes du Val-de-Marne, il a tenté de bloquer le marché de Rungis. « Je voulais cibler un lieu stratégique », raconte aujourd’hui ce vendeur dans le secteur alimentaire, pour qui l’occupation des ronds-points et les manifestations du samedi semblent trop peu efficaces. Nouvelle génération, nouvelles méthodes. Le parcours de Rémi illustre l’évolution récente des mouvements sociaux, caractérisée par un rejet des pratiques et des appareils militants traditionnels. Pour peser, mieux vaut bloquer le « ventre de Paris » ou quelques dépôts pétroliers. Quatre ans avant les Gilets jaunes, les anonymes du Comité invisible scandaient déjà : « Le pouvoir est logistique. Bloquons tout ! ». Une reprise du slogan « Bloquons tout ! », apparu lors du mouvement anti-CPE (contrat première embauche) de 2006, auquel les auteurs ont ajouté un constat, déjà éprouvé par d’autres...