Tournant politique

Campagnes rouges : les luttes anticapitalistes des Paysans-Travailleurs

Rassemblement sur le plateau du Larzac durant l’été 1973 (24-25 août).
Rassemblement sur le plateau du Larzac durant l’été 1973 (24-25 août). Centre d’histoire du travail, Fonds René Bourrigaud.

Dans la playlist des éditorialistes politiques, l’opposition entre écolos des villes et agriculteurs des champs est un titre incontournable. Si cette rengaine recouvre une part de réalité, elle est également le fruit d’une rhétorique politique essentialisante qui vise à diviser pour mieux régner : déjà dans les années 1960, les intellectuels droitiers louaient la sagesse des campagnes conservatrices pour l’opposer aux élans révolutionnaires des mondes ouvrier et étudiant des centres urbains. Un examen plus attentif de l’histoire des luttes paysannes et ouvrières en dévoile les porosités et les frontières brisées, au service d’un front commun contre le capitalisme.

La permanence d’un cliché tenace – celui d’une allergie historique entre campagnes conservatrices et villes à gauche – a longtemps contribué à invisibiliser les paysans des récits de luttes révolutionnaires et émancipatrices. « Le plus souvent,observe par exemple la sociologue Élise Roullaud, lorsque l’on évoque Mai 68, ce sont des visages d’étudiants et d’étudiantes ou d’ouvriers et d’ouvrières, des images de barricades érigées dans les rues parisiennes qui viennent à l’esprit. »

Article issu de notre n°67 « Résistances rurales », disponible en kiosque, en librairies et sur notre boutique.

Pourtant, le 24 mai 1968, c’est une horde de tracteurs, flanquée de deux mille paysans, qui pénètre dans Nantes pour y rabattre l’édredon de la révolution. La ville est au bord de l’insurrection depuis le début des « événements de mai » – dix jours plus tôt, c’est à quelques kilomètres que fut sonné le coup d’envoi de la grève générale avec l’occupation, par ses ouvriers, de l’usine Sud-Aviation. Au cortège paysan se joignent ouvriers et étudiants, qui convergent en une procession joyeuse et combative vers la place Royale, au centre de la ville. Cette dernière est aussitôt rebaptisée « place du Peuple » tandis que du haut de sa fontaine, deux paysans de Couëron – les frères Blineau – brandissent une banderole incisive : « Non au système capitaliste, oui à la...

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NUMÉRO 67 : DÉCEMBRE 2024 - JANVIER 2025:
Résistances rurales : Comment lutter contre l'extrême droite depuis les campagnes ?
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