Une linguiste punk ? La proposition fait sourire Colette Grinevald. Il faut dire que l’on imagine difficilement plus inconciliable. Cette professeur émérite, diplômée de Harvard, qui nous reçoit chez elle, à Lyon, au pied des pentes de la Croix-Rousse, a dédié sa vie à tout ce qui sonne comme un cauchemar d’élèves de collège : « préposition », « suffixe », « syntaxe »… Il suffit pourtant de quelques minutes pour que la dame de 75 ans nous donne miraculeusement envie de reprendre des cours de grammaire : « Il n’y a rien de plus excitant ! Percer le fonctionnement d’une langue, c’est percer un petit peu plus le mystère du monde. » Sur la table devant elle, un gros bouquin jaune marqué de son nom. Une thèse écrite en quasi-secret, dans les montagnes tropicales. « Punk, peut-être pas… Mais c’est vrai que ça ne m’a jamais intéressé de faire comme tout le monde. »
Article issu de notre numéro 56 « Géo-ingénierie, c'est parti ? », en kiosque jusqu'au 10 avril et sur notre boutique.
Pionnière dans l’étude des langues en danger, Colette Grinevald a en tout cas participé dans les années 1970 à révolutionner l’approche de la linguistique. C’est dans la bouillante université Paris-Nanterre, période pré-Mai 68, que sa carrière universitaire débute. La voie, initialement toute tracée : elle compte devenir professeure d’espagnol, comme son père enseigne l’allemand. Son prof, Bernard...