Littérature et utopies

Commencer à vivre humainement : Albert Camus, Édouard Glissant et Virginia Woolf

La force vient parfois à manquer. La force de combattre, de résister, de refuser, de bâtir et rebâtir encore et encore. Peut-être défaillons-nous plus aisément lorsque nous avons perdu de vue ce qui vaut la peine de vivre, lorsque ce que l’existence compte de beauté s’est dérobé à notre vue. C’est dans ces moments qu’il faut pouvoir réassurer sa prise. Fort heureusement, la littérature politique et fictionnelle regorge d’images mentales qui viennent à notre secours et nous aident à vivre humainement. Des lucioles surgissant du fond de la nuit à la lune qui se dévoile et l’éclaire, de la chambre où l’on est chez soi à l’archipel où l’on est par les autres, du lierre rusé qui grimpe à l’été qui écrase jusqu’à l’hiver en nous… Petite galerie subjective en trois images.

Article issu de notre hors-série « Comment nous pourrions vivre » avec l'écrivaine Corinne Morel Darleux, rédactrice en chef invitée. En kiosque jusqu'au 10 janvier et sur notre boutique.


L'invicible été de Camus

« J’avais toujours su que les ruines de Tipasa étaient plus jeunes que nos chantiers ou nos décombres. Le monde y recommençait tous les jours dans une lumière toujours neuve. Ô lumière ! c’est le cri de tous les personnages placés, dans le drame antique, devant leur destin. Ce recours dernier était aussi le nôtre et je le savais maintenant. Au milieu de l’hiver, j’apprenais enfin qu’il y avait en moi un été invincible. »

Quand Albert Camus (1913-1960) écrit ces lignes, il a presque 40 ans. L’homme n’est pas encore vieux, bien qu’il ne lui reste que huit années à vivre. Mais une nostalgie l’étreint en parcourant à nouveau les ruines de cette cité antique d’Algérie qui, quinze ans plus tôt, inspirait les pages incandescentes du recueil Noces : « Assis devant la table, je tente de saisir entre mes cils battants l’éblouissement multicolore du ciel blanc de chaleur. Le visage mouillé de sueur, mais le corps frais dans la légère toile qui nous habille, nous étalons tous l’heureuse lassitude d’un jour de noces avec le monde. » Depuis lors, le jeune écrivain a vécu ; il y a eu la métropole, la guerre, la gloire – et le désespoir. Camus vient de publier son grand essai philosophique,...

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NUMÉRO 66 : OCTOBRE-NOVEMBRE 2024:
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