C’était à une soirée, je parlais avec un type que je connaissais un peu, on échangeait sur nos recherches respectives. Alors, me dit-il, c’est toi qui bosses sur les carottes et les navets en ville ? Au détour d’une petite phrase assassine, voilà mes dix années d’enquête à travers les potagers des métropoles réduites à quelques légumes-racines un peu terreux – lui travaille sur les briques et le capitalisme, ça fait tout de suite plus sérieux. Sous-entendu les potagers ça n’intéresse que les bonnes femmes, les bobos tendance colibris et les apprentis bifurqueurs.
Texte à retrouver dans Bascules #3 - 10 propositions pour un tournant radical, en kiosque, librairie et sur notre boutique.
Sous-entendu c’est bien joli les jardins, mais ça doit produire au mieux quelques radis, c’est pas comme ça qu’on va nourrir le monde et sauver la planète. D’ailleurs, ne dit-on pas que « l’écologie sans lutte des classes c’est du jardinage » ? Dans un bel effort de mansplaining à peine voilé, il me signifie que cultiver en ville est une pratique dépolitisée, bonne à ranger dans la catégorie de l’écologie inoffensive.
Reprenons. Qu’observe-t-on quand on arpente les potagers, qu’on discute avec celles et ceux qui les cultivent ? Quand on y donne un coup de main et qu’on suit des luttes pour les défendre ? On découvre que les jardins ouvriers, familiaux ou partagés permettent de manger des bonnes tomates du jardin,...