On parle souvent de l’alimentation comme la préoccupation majeure pour consommer de manière plus responsable et plus respectueuse de la planète. Mais il ne faut pas oublier d’autres consommations courantes toute aussi néfastes. La mode est la deuxième industrie la plus polluante au monde: pour fabriquer un jean, on consomme autant d’eau qu’on ne boit en 14 ans. De plus, avec la multiplication des enseignes à bas prix, à l’image de H&M, Zara ou Primark, on est entrés dans une ère de la “fast-fashion”: les vêtements devenu un bien low cost, on les change d’une saison à l’autre pour rester dans le coup. Les Français achètent en moyenne 30 kg de vêtements par an. Et enfin, tous les ans, ce sont 12 kg de vêtements qui sont jetés par personne, dont 60% seraient réutilisables (selon l’Ademe).
Quand la Fast-Fashion se met au recyclage : une fausse bonne idée ?
Pour répondre à ces défis, certaines marques ont commencé à encourager le recyclage de vêtements, comme Puma, H&M ou Marks and Spencer, qui donnent des bons d’achat aux clients qui ramènent leurs vieux habits. Sauf que cette pratique incite à plus de consommation, et ne résoudrait pas le problème, selon Greenpeace. Dans un communiqué de novembre dernier, l’ONG déclarait “à l’heure actuelle, le recyclage n’est pas une solution. Le marché des vieux textiles est saturé et les défis technologiques font que recycler les vêtements pour récupérer les fibres n’est pour le moment pas commercialement viable.” Quant au don de vêtements aux pays en voie de développement, Oxfam a commencé à décourager la pratique, car les pays du sud ne savent plus quoi en faire, et l’arrivée massive de vêtements à bas coût détruit l’industrie textile locale.
Heureusement, les acteurs n’ont pas attendu les grandes marques pour agir, et lancent des initiatives bien plus efficaces pour répondre aux défis posés.
Revaloriser les stocks dormants de vêtements
Crédit : Lucie Sassiat
Le manifeste des Récupérables tient en quatre mots: alternative (au système en place), désobéissance (à l’obsolescence programmée et la “numérotation des individus”), optimisme et inclusion. Imaginée par Anaïs Dautais Warmel, cette jeune marque a fait de la récupération une philosophie: “Les Récupérables ou comment la Mode, moyen d’expression, peut devenir un moyen d’action”, écrivent-t-ils sur leur site web. Anaïs travaillait à la friperie solidaire de la Petite Rockette lorsqu’elle s’est rendu compte de la richesse des tissus récupérés. Chez les Récupérables, avec un peu d’imagination, des ciseaux et une machine à coudre, on transforme d'ancien linge de maison et tissus d'ammeublement en vêtements uniques et fleuris.
Axelle Nick travaille sur le même principe: faire du neuf avec du vieux. Elle a fondé la marque Axelle & Cie en 2015. Dans son atelier à Montreuil, elle lave, recoupe, teint et assemble des vêtements vintage pour créer des modèles inédits.
Recycler les chaussettes esseulées
Il y a une loi de la nature qui dit que lorsqu’on s’endort avec deux chaussettes, on se réveille avec une seule, et la seconde disparaît pour toujours. Mais il existe maintenant une agence matrimoniale pour les chaussettes célibataires. Dans son atelier situé au cœur de la Goutte d’Or à Paris (19e), Marcia de Carvalho recycle les chaussettes pour en faire de nouvelles, de la laine, des pulls, des écharpes et même des tableaux d’art. “Chaussettes Orphelines” est aussi un projet solidaire et organise des ateliers d’insertion avec les habitants du quartier, qui viennent apprendre à recycler et à transformer les chaussettes.
Des jeans Made in France
Des jeans fabriqués à moins de 1083 km de chez vous ! C’est la promesse de 1083, la marque créée par Thomas Huriez, 33 ans, et son petit frère, Grégoire, pour produire et commercialiser des jeans de coton bio confectionnés en France, c'est-à-dire filés, teints et tissés dans l'Hexagone. 1083, c’est la distance entre les deux villes les plus éloignées de France, du Finistère à la Côte d'Azur. Ils ont lancé le projet en Crowdfunding en 2013, et depuis, ils ont vendu plus de 10 000 jeans. Mais ils ne se sont pas arrêtés là: en 2014, ils ont fondé une seconde marque, le Tricolore, qui produit des nouveaux pulls à partir des anciens, détricotés dans le Tarn puis retricotés dans la Loire.
Partager sa penderie
Hylla, c’est (presque) comme cette amie cool qui s’habille bien et qui veut bien nous prêter ses fringues. C’est une penderie partagée, où l’on peut se rendre une fois par mois à la Recyclerie au nord de Paris. Les femmes s’abonnent mensuellement pour louer des vêtements et des accessoires de mode. L’avantage est de pouvoir renouveler sa garde robe, sans avoir à investir. Pour les pièces un peu hors-de commun, qu’on ne mettrait pas tous les jours, c’est une bonne solution. Ils ne proposent que des pièces uniques et vintages, issues de dons, ou dénichés dans des vides greniers et des friperies.
Comme quoi, la mode écolo ne vient pas au prix de la créativité ni de la diversité. Pour le moment, ce sont des initiatives qui coûtent chère, mais mieux vaut acheter une pièce qu’on aime qu’une pièce qu’on laissera traîner au fond de l’armoire. Aujourd’hui, chaque logement renferme 114 euros de vêtements qui n’ont jamais été portés.
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