Le mouvement contre la réforme des retraites l’a rappelé : dès que la contestation s’autorise une certaine radicalité, éditorialistes, animateurs et présentateurs les plus en vue froncent les sourcils et haussent le ton. Deux ans de plus qui vont littéralement faire mourir des gens au travail ? « D’accord, d’accord, mais ces poubelles, allez-vous les ramasser oui ou non ? » Cette tragi-comédie médiatique s’enclenche irrémédiablement, à chaque conflit social. À tel point que tout projet de transformation sociale un tant soit peu sérieux est condamné à se heurter à ce mur de l’information. Comment pourrait-il en être autrement quand quasiment tous les grands médias sont des entreprises privées dont le destin est lié à celui du capitalisme ?
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Inutile de s’inquiéter, entend-on dans certains milieux militants : ces vieux canaux que sont les journaux, la radio et la télévision n’intéressent plus personne à part les boomers. Tout se jouerait désormais en ligne, où chacun peut picorer selon ses envies, hors du carcan idéologique des médias mainstream. Et pour qui veut faire entendre une parole dissidente, quelques clics suffiraient. L’idée n’est pas neuve. Déjà, à la fin des années 1990, quand internet déployait sa toile, le mouvement altermondialiste s’enthousiasmait pour le...