C’est une sorcière dont le nom est connu à travers toute l’Estonie, qui répond à nos messages WhatsApp en multipliant les émojis. Elo Liiv résume bien les paradoxes de ce petit pays du nord de l’Europe, hyper-connecté mais qui entretient aussi un lien profond avec la nature. Quand on demande l’adresse de « la sorcière » aux habitants de la petite île de Saaremaa, séparée du continent par un bras de la mer Baltique, personne n’a l’air surpris et chacun sait pointer la direction de sa maison. Accrochés au portail, quelques crânes de vaches ne permettent plus de douter.
Reportage à retrouver dans notre numéro « Êtes-vous éco-anxieux ? », disponible en kiosques et sur notre boutique.
L’ambiance occulte est toutefois bien vite dissipée : Elo Liiv nous reçoit en tenue de jardinage, sécateur en main, et discute d’un ton badin en nous emmenant vers le fond du jardin. « Il faut toquer sur la planche de bouleau », lance-t-elle sur le ton de la conversation alors que nous dépassons un jeune pin. La planche, tenue par deux cordes rongées par les années, sur laquelle pendent deux clochettes, sonne d’un bruit mat. « C’est bon, les esprits sont prévenus. Il faut se signaler parce qu’on entre dans une partie sacrée de la forêt. »
On s’arrête devant un autel sur lequel elle entasse les branches qu’elle était en train de couper, et poursuit la discussion en démarrant un feu. Les flammes lèchent le bois et Elo...