Vous êtes historien, enseignant-chercheur à l’université de Bourgogne et spécialiste de l’histoire des techniques. En quoi l’arrivée des techniques industrielles a-t-elle modelé notre rapport au monde, notre façon d’être ?
Votre question est vaste tant les choix techniques et les cultures matérielles ne cessent de façonner nos rapports au monde et aux autres. Ce que l’on appelle les techniques industrielles a très profondément transformé notre rapport au monde : ces techniques, que l’on peut dater de la « révolution industrielle », permettent d’accroître la capacité de production, la puissance, le contrôle que les sociétés exercent sur leur milieu.
Article issu de notre numéro 60 « La tragédie de la propriété », en kiosque, librairie et sur notre boutique.
Elles ont permis de démultiplier la puissance productive, inaugurant ce qu’on appelle désormais l’Anthropocène, et son ambivalence, tant la nouvelle puissance d’agir devient aussi une nouvelle puissance destructrice. On a longtemps considéré ces techniques comme un progrès, la condition du confort moderne, qui permettait de s’émanciper des contraintes pesant sur les sociétés anciennes.
Derrière ces techniques qui se multiplient à partir de la fin du XVIIIe siècle émergent un tout autre monde et de nouveaux imaginaires, dont l’élément le plus symbolique est la machine à vapeur. En utilisant un combustible fossile connu depuis longtemps – mais peu...