Guérilla juridique 1/5 : Rendre les traités internationaux contraignants
Le 12 décembre 2015, un accord jugé historique pour la préservation du climat était scellé à Paris. Au terme de longues négociations, les 196 membres de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques s’engageaient à maintenir le réchauffement climatique dans la fourchette de +1,5 °C à +2 °C« par rapport aux niveaux préindustriels ». Seulement voilà, six ans plus tard, les illusions se sont dissipées : les rares progrès accomplis ont été jusqu’ici insignifiants quand la situation n’a pas tout bonnement empiré. Depuis le Sommet de la Terre, organisé par les Nations unies en 1972, plus de 300 traités multilatéraux régionaux relatifs aux questions environnementales ont été ratifiés. Pourtant, pour ce qui est d’obtenir des effets, le droit international semble manifestement inefficace.
Doit-on continuer à espérer que les traités multilatéraux puissent produire des changements significatifs ? La justice internationale doit-elle se doter de nouveaux outils, ou bien faudrait-il plutôt réformer l’existant ? Si l’Organisation mondiale du commerce (OMC) dispose d’un organe de règlement des différends doté d’un pouvoir de sanction, pourquoi la lutte contre le réchauffement climatique ne pourrait-elle pas en avoir un ? Car parmi les causes de ces échecs répétés, l’absence de sanction en cas de non-respect des engagements ne compte pas parmi les moindres.
En 1997, le protocole de Kyoto avait bien tenté d’instaurer une ébauche de pouvoir via la création d’un « mécanisme d’observance » contrôlant le respect des engagements et appliquant des sanctions en fonction. Un pays ne parvenant pas à réduire le niveau de ses émissions de gaz à effet de serre (GES) comme il s’y était engagé pouvait alors se voir infliger une pénalité. Mais, afin d’éviter ces sanctions, des pays, comme le Canada ou le Japon, se sont tout simplement retirés du protocole.
« Le droit international est le fruit de la coopération entre les États et son contenu se limite nécessairement à ce que ceux-ci souhaitent y inscrire. On ne peut pas attendre du droit international qu’il apporte une solution simple au problème complexe des changements climatiques », admet Marion Lemoine-Schonne, juriste spécialisée en droit international de l’environnement. Toutefois, il « oblige les États à relever régulièrement leur niveau d’ambition d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre ». L’accord de Paris comporte bien des injonctions : tous les pays doivent présenter un plan d’action climatique, le réviser tous les cinq ans, être transparents sur ce qu’ils font...
Cependant, « les évolutions sont trop lentes par rapport à l’urgence de la situation. Jusqu’ici, les États se sont mis d’accord sur les grands objectifs, mais ils ne discutent pas vraiment, ou trop peu, du comment », souligne Sandrine Maljean-Dubois, directrice de recherche au CNRS, spécialiste de droit international de l’environnement. L’idée d’un tribunal ad hoc aurait dès lors une dimension symbolique très forte. « Mais nous sommes là dans la science-fiction juridique », assène la chercheuse. À défaut, la Conférence des parties travaille sur la robustesse du cadre de transparence...
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