Politique et représentativité

Jacques Rancière : « Il n'y a pas de science de la politique »

Photographies : Emma Birski

Il y a trente ans, l’effondrement du bloc soviétique aurait inauguré une nouvelle ère : celle de la démocratie et du capitalisme universels qui, régnant désormais de concert et sans partage, devaient accoucher d’un monde pacifié. Comme l’a très tôt vu Jacques Rancière, cette prophétie n’a servi qu’à dissimuler la violence d’un camp autoproclamé du « bien ». Dans Les Trente Inglorieuses, recueil de textes et d’interventions produits au cours des trois dernières décennies, le philosophe donne à voir la logique profondément inégalitaire et autoritaire de ce nouvel ordre, qui brade au libre marché tout ce qui peut encore subsister de solidarité.

Selon l’expression de l’économiste Jean Fourastié (1907-1990), les « Trente Glorieuses » furent une période de croissance et d’élévation du niveau de vie en France, allant de l’après-guerre jusqu’au milieu des années 1970. Comment définiriez-vous les « Trente Inglorieuses » qui viennent de s’écouler ?

« Inglorieux » n’est pas pris ici au sens économique du terme. Il ne s’agit pas d’opposer des années de récession à des années de prospérité. Les phénomènes peu glorieux de ces trente dernières années sont la croissance des inégalités, la croissance de toutes les formes d’autoritarisme et d’une vision policière du monde, mais aussi une violente régression idéologique, devenue visible de manière éclatante lors de la fin de règne de Donald Trump.

Retrouvez ce grand entretien dans notre numéro 50 « À quoi devons-nous renoncer ? ».

Dans un système électoral comme celui des États-Unis qui, depuis plus de deux siècles, était un modèle de fonctionnement des institutions républicaines, tout d’un coup, un président battu aux élections a dit « je n’ai pas perdu » et il a trouvé des troupes de fanatiques pour le prendre au mot. C’est la marque d’un processus de réversion qui se manifeste également chez nous avec le développement de plus en plus décomplexé des idéologies d’extrême droite, aboutissant à un climat vraiment putride : les seules idées encore débattues sur la...

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NUMÉRO 66 : OCTOBRE-NOVEMBRE 2024:
La crise écologique, un héritage colonial ?
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