Les habits verts du colonialisme
L’Invention du colonialisme vert. Pour en finir avec le mythe de l’Éden africain Guillaume Blanc, Flammarion, 9 septembre 2020, 352 pages, 21,90 €.
L’Invention du colonialisme vert. Pour en finir avec le mythe de l’Éden africain Guillaume Blanc, Flammarion, 9 septembre 2020, 352 pages, 21,90 €.
L’Afrique est une féerie. Étendues vierges, savane mouchetée d’arbrisseaux, fleuves tumultueux, sommets éternels y accueillent une faune enchanteresse : rhinocéros, guépards et autres antilopes sont les innocents joyaux de cet Éden, aujourd’hui en péril. « Mais cette Afrique n’existe pas, Elle n’a jamais existé», balaie Guillaume Blanc, historien de l’environnement. Son livre-enquête s’attaque à un mythe aussi tenace que paradoxal : celui d’une nature africaine à la fois inviolée... et menacée. Par qui ? Par les Africains eux-mêmes. Selon une idée farouchement défendue par les colons occidentaux depuis la création des premiers parcs safaris sur le continent au XIXe siècle, la préservation de ces « sanctuaires » nécessiterait leur mise sous cloche. Autrement dit : il faut les débarrasser de leurs usages traditionnels (agropastoralisme, chasse, coupe de bois) – quitte à exproprier et violenter ceux qui y vivent. Cas d’école, l’arbitraire qui se déploie contre les populations du parc national du Simien, en Éthiopie, est abondamment commenté grâce aux archives auxquelles l’auteur a eu accès. Labellisé Patrimoine mondial en 1978, cet espace protégé est déclassé en 1996. Au nom de la défense de la biodiversité, les experts et scientifiques d’organisations internationales, comme l’Unesco et le WWF, ne cesseront de réclamer le départ des populations locales, quitte à demander à l’État éthiopien d’y « abolir tous les droits humains ». Arguments néomalthusiens et faux rapports déclinistes à l’appui, une « naturalisation » à marche forcée, héritée du colonialisme, criminalise les populations qui vivent dans et aux abords de ces parcs, un peu partout en Afrique. Sauf que, note l’auteur, « pour sauver la planète, il faudrait vivre comme ces habitants expulsés ».
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