Vancouver, Canada, 29 août 2018
L’après-midi s’étire, le ciel est délicatement brumeux. Je retrouve Julie Cruikshank dans le petit café des Waves au 492 Hastings Street, tout près des bâtiments de l’université Simon Fraser et des anciens docks du port. Les lance-vapeur sifflent, les rires fusent, nous nous installons près d’une vitre et reprenons le fil d’une conversation entamée à distance sur l’anthropologie des glaciers dont elle est la spécialiste. Mon carnet est rempli de notes et de questions. Peu de minutes suffisent à nous transporter du côté de l’Alaska et du Yukon, ses deux régions de prédilection. Les glaciers d’altitude brillent au soleil, les voix des peuples tlingit et athapascan résonnent dans les grands fjords, on respire l’odeur sèche et résineuse des cèdres rouges. Quant aux corbeaux qui sautillent dehors sur les trottoirs, ils sont les messagers d’un autre temps. Le soir commence à tomber, la grille de fer articulée du magasin d’en face roule sur son rail. L’air frais de la rue achève de nous rendre à la ville et à ses bruits. Avant de se quitter, nous vérifions l’horaire de la conférence où nous devons nous revoir le lendemain, nous évoquons encore nos dernières lectures et le nom de « Queneesh ». Me voici d’un coup projeté en arrière, quelques jours plus tôt, sur la côte Est de l’île de Vancouver, entre Comox et Courtenay. J’étais devant le mur peint de la Big House des...