Déjeuner dominical, les plats gargantuesques s’empilent au fil de bavardages convenus. L’ado de la famille s’ennuie, lève les yeux au ciel et constate que de grosses gouttes perlent du plafond, ruissellent entre les planches, jusqu’à inonder la pièce. Pendant que la tablée s’empiffre comme si de rien n’était, elle tente par tous les moyens de colmater les fissures, en vain, tandis que son bambin de petit frère manque de se noyer en geignant. Lorsque le salon est pleinement englouti, la petite troupe déménage sa joyeuse cécité, ainsi qu’une montagne d’entremets, dans les combles du pavillon.
Ouvrant la lucarne, l’adolescente constate avec effroi que le niveau de l’eau est monté jusqu’aux toits des maisons alentour. L’océan s’étend à perte de vue, laissant poindre quelques cheminées émergées de sa lisse surface. Sixtine Dano clôt, avec ce court-métrage d’animation parabolique intitulé Thermostat 6, son passage à l’école d’art des Gobelins.
Aujourd’hui, elle attend le délibéré de son procès pour « tentative d’entrave à la circulation d’aéronefs » et « dégradation en réunion » du grillage à l’entrée du tarmac, après s’être introduite, le 3 octobre 2020, sur les pistes de l’aéroport de Roissy, avec d’autres militants. Pour s’être ainsi opposée au projet d’extension du terminal 4, finalement abandonné par le gouvernement en février dernier, Sixtine risque jusqu’à trois mois...