C’est un pays où la montagne est noire, l’eau est blanche et les vaches sont bleues. La vallée de l’Orbiel sinue entre de hautes collines boisées sur les flancs desquelles se déploie une palette de mille nuances de vert, tachetées du jaune des premières feuilles d’automne. Par beau temps, on aperçoit les Pyrénées qui se dressent, loin au sud, derrière la cité médiévale de Carcassonne. Difficile d’imaginer que les arbres de ce pays de cocagne enfoncent leurs racines dans « l’une des plus grandes décharges chimiques du monde ».
Reportage issu de notre numéro 55 « Bienvenue dans l'ère du rationnement », en kiosque en décembre-janvier et sur notre boutique.
C’est du moins ainsi que Frédéric Ogé, chercheur émérite au CNRS, décrit le lieu qu’il a choisi pour sa retraite. Quand on lui fait remarquer qu’un spécialiste des sols pollués aurait pu s’installer dans une région plus saine, le septuagénaire aux cheveux ébouriffés esquisse un sourire amusé : « Je vous avais prévenus : interdiction de vous moquer ! » De fait, l’ancien chercheur a une retraite active : depuis plusieurs années, il entraîne étudiants, politiques et journalistes dans des « toxic tours » à la découverte des pollutions cachées dans le décor. Alors qu’un crachin arrive de l’est, nous nous arrêtons sur la verse de Ramelle, depuis laquelle on peut contempler le site de Nartau : une haute carrière qui témoigne du passé...